interview isabelle ferreras

Et si la démocratie s’invitait dans l’entreprise ?

Si l’association des citoyens aux décisions publiques se développe depuis plusieurs décennies en France, ce phénomène peine à se diffuser dans le monde du travail. Les travailleurs sont peu associés à la vie de leur entreprise et aux décisions qui la concernent (ses finalités, ses profits, les services/produits proposés, etc.). Ce que les sociologues appellent la “démocratisation du travail” apparaît pourtant comme une nécessité dans un contexte d’après-pandémie et de crise climatique, qui bouleverse notre rapport au travail et notre modèle économique. 

Nous avons échangé avec Isabelle Ferreras, sociologue et politologue, professeure à l’Université de Louvain, sur l’association des travailleurs aux décisions de leur entreprise, les enjeux que cela soulève, les freins auxquels elle fait face et les formes concrètes que cette participation pourrait prendre. 

Voici quelques bribes de cette conversation riche qui apporte de nouvelles pistes de réflexion sur l’organisation du travail telle qu’elle existe aujourd’hui en France…

  • Vos travaux portent sur la nécessité de donner plus de pouvoir aux travailleurs au sein de leur entreprise pour leur permettre de peser sur les décisions qui la concernent. En quoi ce n’est pas déjà le cas ? En quoi le fonctionnement des entreprises n’est pas démocratique ? 

Nous ne pouvons pas considérer aujourd’hui que le fonctionnement des entreprises soit démocratique en raison de ce que j’appelle la contradiction capitalisme/démocratie. 

Dans le champ politique, des règles de fonctionnement communes s’appliquent à tous et toutes en vertu de l’idéal démocratique. Ainsi, chaque citoyen dispose d’un droit de vote, égal à celui des autres, lui permettant d’élire ses représentants. Les mécanismes de représentation et d’élection existants sont perfectibles, mais des moyens sont mis en œuvre pour tendre vers cet idéal, en partant du principe qu’il n’est jamais réellement fini.  

“Tandis que chaque individu a les mêmes droits en démocratie, le système capitaliste alloue les droits et les pouvoirs de décision en fonction des capitaux apportés dans l’entreprise.” 

Dans le champ économique, il n’en est rien. Le capitalisme prend le pas sur la démocratie. Tandis que chaque individu a les mêmes droits en démocratie, le système capitaliste alloue les droits et les pouvoirs de décision en fonction des capitaux et de l’argent apportés dans l’entreprise. Plus une personne investit du capital, plus elle peut exercer des droits politiques et prendre part aux décisions prises au sein de l’entreprise. 

De fait, si vous n’avez pas injecté d’apports en capital, vous n’avez pas de droits politiques, vous n’êtes pas un citoyen de l’entreprise. Vous faites fonctionner l’entité politique qu’est l’entreprise sans avoir le pouvoir de peser sur les décisions, ce qui est le cas des travailleurs.

“La perspective de démocratisation renverse la hiérarchie entre capital et travail : alors que le capital est survalorisé dans le capitalisme, la démocratisation suppose que chaque individu détient les mêmes droits au sein de l’entreprise.”

  • Pour vous, le principal frein à la démocratisation réelle du travail est donc le système capitaliste ?

Oui,  le principal obstacle à la démocratisation est l’idée que seuls ceux qui apportent du capital au sein de l’entreprise sont légitimes de se positionner sur tous les enjeux qui la concernent. 

La perspective de démocratisation renverse la hiérarchie entre capital et travail : alors que le capital est survalorisé dans le capitalisme, la démocratisation suppose que chaque individu détient les mêmes droits au sein de l’entreprise. Dans ce cas, chaque personne aurait une légitimité à prendre part aux décisions de l’entreprise grâce à son investissement dans son travail, qui serait considéré comme aussi important et précieux que l’apport en capital. 

Si on va un peu plus loin, l’apport en capital provient toujours de quelque chose qui est extérieur aux individus : un avoir, une fortune, etc. Il ne s’agit pas d’un investissement personnel, de sa personne, de son temps, de son esprit… Alors que les travailleurs investissent leur santé mentale et physique dans leur travail. On l’a vu lors de la pandémie : certaines personnes risquent leur vie en travaillant. 

Le seul risque qu’un apporteur de capital prend est de perdre ce qu’il a investi. Ce qui est, toute proportion gardée, moins grave que les burn-out profonds ou bien les suicides liés au travail. Ce sont des faits de civilisation qui témoignent du cœur même de ce qui se joue dans le gouvernement du travail capitaliste. Ce constat rend d’autant plus injuste le fait que les travailleurs, contrairement aux apporteurs en capitaux, ne soient pas associés aux décisions.

“La justice distributive ne suffit pas, il est également nécessaire de tendre vers une justice politique pour que les travailleurs puissent prendre part aux décisions prises par leur entreprise, d’autant plus qu’ils sont les seuls à qui elles s’appliquent.”

Suite à la pandémie, de nombreuses paroles ont exprimé qu’il fallait plus de justice distributive en augmentant les bas salaires des “travailleurs essentiels ». C’est une évidence, mais il n’y a pas encore de décisions politiques en ce sens, alors même que les plus riches ont profité de cette pandémie. 

Par ailleurs, la justice distributive ne suffit pas, il est également nécessaire de tendre vers une justice politique pour que les travailleurs puissent prendre part aux décisions prises par leur entreprise, d’autant plus qu’ils sont les seuls à qui elles s’appliquent. Or le principe démocratique veut que lorsqu’une règle pèse sur un individu, il doit pouvoir y prendre part. 

  • Une fois ce constat posé, on peut s’interroger sur la manière dont s’est diffusé l’enjeu de la démocratisation du travail et la nécessité d’étendre l’idéal démocratique au monde des entreprises.

La nécessité de démocratiser le travail a pris racine dans un double phénomène : les évolutions du droit du travail et le passage d’une économie industrielle à une société de services. 

En matière de droit du travail, la 2ᵉ Guerre Mondiale a été déterminante puisque la création des comités d’entreprises faisait partie des propositions du Conseil National de la Résistance. À cette époque, l’objectif est d’étendre la citoyenneté dans le monde du travail, en reconnaissant l’investissement des travailleurs au-delà du salaire qui leur est attribué. Les travailleurs sont considérés comme des participants à la vie de l’entreprise, ce qui mène en 1982 aux lois Auroux dont le préambule est : “citoyen dans la cité, citoyen dans l’entreprise”. 

Le second phénomène dans lequel la nécessité de démocratiser le travail prend racine est le passage d’une économie industrielle à une société de services. Jusqu’aux années 1970, les ingénieurs sont co-décisionnaires dans l’entreprise : ils pensent le processus d’organisation du travail tandis que les ouvriers exécutent. 

“Le moment d’exécution lui-même nécessite une véritable appropriation des finalités du travail, ce qui implique de peser sur celles-ci.”

Dans les années 1970, on bascule vers un régime de services dans le monde occidental, où plus de 80% de l’activité est issue du secteur tertiaire. La division du travail qui existait jusqu’alors ne tient plus. Il y a une prise de conscience du fait que les salariés doivent participer à la conception du travail et pas uniquement à son exécution. Il n’est plus possible de considérer qu’il suffit de s’en tenir à exécuter des principes édictés a priori. Le moment d’exécution lui-même nécessite une véritable appropriation des finalités du travail, ce qui implique de peser sur celles-ci. 

Pour prendre un exemple, imaginez que vous travaillez dans une entreprise qui vend des plateformes participatives en ligne. Quand vous vendez une plateforme à une entreprise X, ce n’est pas la même chose que quand vous la vendez à l’entreprise Y. Vous allez souvent adapter le produit, écrire quelques lignes de code pour vous adapter aux besoins du client. Dans ce cas, vous pesez sur les finalités du travail, vous ne pouvez pas vous appuyer sur un plan d’exécution qui a été mis au point et ne doit plus bouger. 

Cet exemple montre que dans une société de services, il est nécessaire de se mettre à la place du client, d’adopter son point de vue pour adapter le service à ses besoins. Cela implique une certaine marge de manœuvre. Il ne s’agit plus d’un régime taylorien qui repose sur une séparation étanche entre conception et exécution du travail, entre l’ingénieur qui conçoit le plan de la ligne de production et l’ouvrier à la chaîne qui se contente d’appliquer. 

Ces deux phénomènes : l’évolution du droit du travail et le passage à une société de services, ont contribué à mettre en évidence la nécessité d’associer les travailleurs aux décisions prises par leur entreprise. 

  • Ce qui semble malgré tout s’être imposé en France est plutôt un modèle “soft” où la participation des salariés à la vie de leur entreprise s’exerce aujourd’hui en France principalement par le biais d’institutions de représentants (délégués du personnel, comité d’entreprise, syndicats)…

C’est là qu’entre en jeu la distinction entre gérer et gouverner. Dans une organisation, il y a deux types de décisions prises : les décisions de gestion et les décisions de gouvernement

Les décisions de gestion, on les connaît bien : comment va-t-on parvenir à un tel objectif ? On déploie ensuite les moyens nécessaires à la réalisation de cet objectif, dont la définition n’a pas été discutée collectivement. 

Les décisions de gouvernement, quant à elles, portent sur les finalités poursuivies par l’entreprise : quels types de services veut-on offrir, quels types de profits veut-on faire,  vers qui va-t-on distribuer ce profit ? Dans les entreprises capitalistes, ces questions sont généralement réservées à ceux qui apportent du capital dans l’entreprise. Les travailleurs ne sont pas amenés à se positionner sur les questions de gouvernement. 

Ils sont principalement associés aux décisions de gestion via le Conseil social et économique (CSE). Cette instance constitue l’embryon d’une chambre de représentation de tous les travailleurs. Il s’agit d’un organe purement consultatif avec des pouvoirs sur un petit nombre de prérogatives : des questions relatives à l’organisation du travail, à la santé/sécurité au travail, et bien sûr un droit à l’information. Mais il ne s’agit pas d’une seconde chambre, en plus du Conseil d’administration, qui serait véritablement amenée à se positionner sur des décisions de gouvernement. 

Le Conseil d’administration, lui, est composé de représentants des apporteurs en capitaux qui ont le droit de peser sur le gouvernement de l’entreprise. C’est cet organe qui détermine les finalités de l’entreprise, dont émane un comité exécutif chargé de mettre en œuvre la politique qu’il a établie.  

“On observe des tentatives de recyclage de la démocratisation des entreprises, de manière à ce qu’elle soit moins dérangeante pour le capitalisme.”

  • Depuis quelques années, le monde du travail voit toutefois émerger de nouveaux concepts et principes tels que l’holacratie, l’entreprise libérée, le management collaboratif… (1) Est-ce le signe d’avancées en matière de partage du pouvoir au sein des entreprises ? 

Il y a en effet une tendance managériale qui vise à associer de plus en plus les travailleurs aux décisions de gestion. Mais il s’agit d’une forme de récupération et de stratégie pour ne pas associer les travailleurs aux “vrais sujets”. On peut voir cela comme des tentatives de recyclage de la démocratisation des entreprises, de manière à ce qu’elle soit moins dérangeante pour le capitalisme.

Ces pratiques restent intéressantes car elles permettent d’observer comment peut être mise en œuvre une véritable discussion participative sur des sujets liés à l’entreprise. Mais l’enjeu est de ne pas se laisser enfermer dans les décisions de gestion et de mettre entre les mains des travailleurs les décisions de gouvernement. 

Car la démocratisation ne peut pas s’arrêter à des questions de gestion. On ne peut pas dire “on adopte le fonctionnement d’une entreprise libérée, mais toutes les questions sur lesquelles le Conseil d’administration se positionne, la rémunération des actionnaires, les finalités de l’entreprise, ce n’est pas entre les mains des travailleurs”. 

“C’est toute la question aujourd’hui : comment va-t-on prendre en compte la nécessité d’associer et d’impliquer les travailleurs qui s’impose de plus en plus ? Est-ce qu’on va tendre vers des organisations démocratiques du travail en acceptant un principe de l’égalité entre tous et toutes ?”

  • Comment aller réellement plus loin dans ce cas ? Quelle forme peut prendre concrètement l’association des travailleurs aux décisions de l’entreprise ?

C’est toute la question aujourd’hui : comment va-t-on prendre en compte la nécessité d’associer et d’impliquer les travailleurs qui s’impose de plus en plus ? Est-ce qu’on va tendre vers des organisations démocratiques du travail en acceptant le principe de l’égalité entre tous et toutes ? Est-ce qu’on va permettre aux travailleurs de peser sur leurs conditions de vie au travail, sur les finalités poursuivies par leur entreprise, en considérant que ces décisions doivent être validées et légitimées par leur soin ? Ou bien est-ce qu’on va se contenter d’une forme très “soft” de participation des travailleurs ?

Nous pouvons nous appuyer sur l’Histoire pour penser la manière dont les travailleurs pourraient réellement peser sur les décisions de leur entreprise. Les humains ne créent jamais à partir de rien, nous sommes toujours les héritiers d’un patrimoine et d’une Histoire. 

On peut ainsi observer que les entités politiques se sont démocratisées par ce qu’on peut appeler “le moment bicaméral” (2) : c’est le moment où la minorité qui gouverne reconnaît que la majorité dont elle dépend pour son bon fonctionnement a aussi le droit légitime de peser sur les lois et les règles de gouvernement. Un principe de double majorité est alors reconnu et requis pour gouverner convenablement. 

“Si on calque cette logique au monde du travail contemporain, pour toute décision prise au sein d’une entreprise, la majorité devrait être obtenue au sein du Conseil d’administration et au sein du CSE où siègent des représentants des travailleurs.”

Au Vᵉ siècle avant JC, la Plèbe n’avait aucun droit jusqu’à ce qu’on lui reconnaisse celui de contester toutes les décisions que les Patriciens prenaient seuls auparavant. C’est un droit de véto collectif qui est le principe même du bicamérisme. 

Si on calque cette logique au monde du travail contemporain, pour toute décision prise au sein d’une entreprise, la majorité devrait être obtenue au sein du Conseil d’administration et au sein du CSE où siègent des représentants des travailleurs. Or aujourd’hui, le CSE ne se positionne pas à la majorité pour valider les décisions du Conseil d’administration. 

Il est donc nécessaire de s’interroger sur la place des travailleurs au sein du Conseil d’administration, qui est le cœur du pouvoir de l’entreprise. À ce sujet, la loi PACTE promulguée en 2019 a reconnu une légitimité des travailleurs à être représentés au sein des Conseils d’administration. Mais il s’agit d’un ou deux représentants… Il reste 80% des voix entre les mains des apporteurs en capitaux.  Par conséquent, il n’y a pas panique à bord. 

Cela révèle la contrainte de démocratisation qui pèse sur les entreprises, mais aussi les manœuvres qu’elles mettent en place pour contourner le partage réel du pouvoir de décision avec les travailleurs. 

  • Existe-t-il des exemples de fonctionnement démocratique des entreprises dans d’autres pays ? 

C’est le cas dans le modèle allemand de co-détermination, et dans une moindre mesure dans les modèles scandinaves. 

En Allemagne, un tournant a eu lieu après la Deuxième Guerre mondiale car les industriels ont joué un rôle crucial dans l’accession de Hitler au pouvoir. Quand les Alliés ont réorganisé l’Allemagne de l’Ouest, ils ont souhaité réduire leur influence en leur imposant une restructuration avec une contrainte de démocratisation. La moitié des postes dans les Conseils d’administration ont ainsi été confiés aux travailleurs et représentants des syndicats. 50% des sièges des conseils d’administration des grandes entreprises allemandes du secteur de l’acier ont été occupés, du jour au lendemain, par des représentants des travailleurs. On peut parler de co-détermination de parité parfaite. Dans les faits, les juristes allemands considèrent qu’il s’agit d’une “fausse parité” car le président du Conseil d’administration a une voix délibérative en plus. 

Mais ce fonctionnement a permis le développement d’une culture de collaboration entre capital et travail, autour des objectifs de l’entreprise, qui est à des années lumières de ce qu’on peut connaître en France.

  • Si la nécessité d’associer les travailleurs aux décisions prises au sein de leur entreprise n’est plus à prouver, ont-ils une volonté marquée de participer ? Si oui, comment s’exprime-t-elle ?

Dans tous les cas, la démocratisation des entreprises apparaît aujourd’hui comme une nécessité, pour toutes les raisons évoquées précédemment, ne serait-ce qu’en termes de justice. Même si des travailleurs ne souhaitaient pas être davantage associés aux décisions, on peut considérer que la situation actuelle n’est pas acceptable car elle n’est pas en phase avec notre projet de société qui repose sur la démocratie. 

Dans les faits, les travailleurs se positionnent déjà sur quantité de choses et de décisions dans le cadre du travail. Mais on ne leur donne pas la liberté de pouvoir véritablement assumer la manière dont ils souhaiteraient se positionner. J’ai par exemple étudié les conditions de travail des caissières de supermarché : j’ai pu observer qu’elles avaient un avis sur quantité de décisions prises dans le cadre du magasin. Leur avis n’est pourtant pas pris en compte, jusqu’au moment où surviennent des problèmes de démotivation, d’absentéisme et de mauvaise organisation du magasin. 

C’est ce que j’appelle l’intuition critique de la justice démocratique au travail : les travailleurs ont l’intuition qu’ils ont un avis éclairé sur un tas de décisions liées au travail, et ne comprennent pas pourquoi il n’est pas pris en compte. Il y a donc une volonté chez les travailleurs d’être associés aux décisions de leur entreprise, qui peut aller jusqu’à un sentiment d’injustice lorsqu’ils comprennent que ce n’est pas le cas. 

Il y a beaucoup d’organisations qui ne tiennent pas compte de ce constat, et qui peuvent ensuite s’étonner que les travailleurs soient démotivés, en proie à de l’aliénation complète ou des burn out. Les travailleurs vont sans cesse se questionner sur le sens et les finalités de leur travail, valoriser ce que fait l’entreprise, s’investir, puis se rendre compte que leur investissement n’est pas pris en compte. L’expérience de cette violence est d’un point de vue psychique et émotionnel extrêmement difficile. 

  • De la même manière que certains chercheurs en sciences sociales alertent sur les liens étroits entre participation citoyenne et transition écologique, vous estimez que le partage du pouvoir au sein des entreprises est une condition indispensable à cette transition. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Nous sommes aujourd’hui dans un rapport extractif au vivant : toutes les ressources, tant naturelles qu’humaines, sont utilisées comme des choses jetables. Ainsi, les entreprises utilisent les humains comme des ressources puis les jettent lorsqu’ils ne sont plus productifs, épuisés, en burn-out, etc. Ces ressources, que sont les travailleurs, sont au service du capital. Partant du principe que les humains sont des ressources à disposition des entreprises, il est évident qu’on se permet de considérer les ressources naturelles, la nature de manière générale, de la même manière. 

Une opportunité se présente aujourd’hui car nous avançons à toute vitesse vers un mur : nous n’avons qu’une planète. Auparavant, le rapport extractif aux humains et au vivant avait un impact de petite ou moyenne portée : un mineur décédait dans le cadre de son travail, on organisait une journée de deuil, puis on le remplaçait en considérant que les humains étaient des ressources remplaçables. 

« La transition écologique ne sera pas possible si on ne démocratise pas les entreprises, si on ne sort pas du rapport extractif aux humains, si on ne change pas de modèle économique.”

Nous avons cru pouvoir adapter le même fonctionnement avec la nature dont l’échelle de destruction a évolué au fur et à mesure. On a pollué un hectare, 10 hectares… Puis des espaces naturels entiers, des océans, jusqu’à réaliser qu’il n’y avait qu’une planète et que ses ressources sont limitées. Il y a aujourd’hui beaucoup de personnes capables de s’en rendre compte, y compris parmi les apporteurs en capitaux. 

Je pense donc qu’il y a un lien profond entre la démocratisation du travail et la transition écologique. Elle ne sera pas possible si on ne démocratise pas les entreprises, si on ne sort pas du rapport extractif aux humains, si on ne change pas de modèle économique. Ce n’est pas une condition suffisante, il y a d’autres problèmes à régler en même temps, mais c’est une condition nécessaire à la transition écologique. 

(1) : L’holacratie qui provient des mots grecs « holos » désignant « une entité qui est à la fois un tout et une partie d’un tout » et de « kratos » signifiant « pouvoir ». Il s’agit donc de donner le pouvoir de gouvernance à l’organisation elle-même plutôt qu’aux égos de ses membres.

L’entreprise libérée est décrite comme une philosophie qui vise à transformer l’organisation d’une entreprise en profondeur. L’idée est de libérer les salariés, leur initiative, leur potentiel afin de booster les performances de l’entreprise.

Le management collaboratif est une pratique de gestion qui vise à supprimer les cloisonnements entre les responsables, les cadres et le personnel pour leur permettre de travailler ensemble.

(2) : Le bicamérisme est un système qui repose sur deux chambres/assemblées, chacune étant dotées d’un pouvoir de décision.

Pour aller plus loin :

> Le Manifeste travail – démocratiser, démarchandiser, dépolluer, de Julie Battilana, Isabelle Ferreras, Dominique Méda, Seuil, 2020 : 

https://www.seuil.com/ouvrage/le-manifeste-travail-isabelle-ferreras/9782021470499 

> Tous les travaux d’Isabelle Ferreras : https://isabelleferreras.net/home/home-fr/

> Réseau Democratizing Work  : http://www.democratizingwork.org 

Lutter contre la précarité menstruelle grâce au budget participatif

Marie Richard a participé à la première édition du Budget Participatif de l’Hérault en déposant l’un des 432 projets proposés en 2020. Son idée portait sur la mise à disposition de boîtes à don de protections hygiéniques dans plusieurs établissements scolaires et médico-sociaux du Département.

Ses objectifs sont multiples : aider les femmes dans le besoin, mettre en avant la solidarité et déconstruire le tabou de la précarité menstruelle et plus généralement des règles. En France, près de 2 Millions de femmes seraient concernées par cette précarité, et certaines jeunes filles manqueraient même l’école parce qu’elles n’ont pas les moyens de se procurer des protections.

Pour déposer son projet et s’assurer qu’il puisse être réalisé, Marie a collaboré avec une association en mesure de fournir les boîtes à dons : Les Solibox.

L’accompagnement de l’association Les Solibox

capture solibox

Fondée en 2019 par deux étudiant·e·s, Léa Martinez et Romain Portella,  Les Solibox est une association qui vise à lutter contre la précarité menstruelle et le tabou des règles.

L’association met à disposition des boîtes de dons de protections hygiéniques (tampons, serviettes,…) en libre service dans les rues de Montpellier et au sein des établissements scolaires. Pour favoriser l’utilisation de ces boîtes, l’association communique beaucoup sur les réseaux sociaux (Facebook, Instagram, LinkedIn et Twitter) et dispose d’un site internet. Des événements sont également organisés afin de récolter des fonds. 

Déjà trois boîtes installées sur le territoire

capture solibox

Le projet de Marie ayant été désigné lauréat grâce aux votes des Héraultais·e·s, le Département de l’Hérault a financé 4 boîtes de dons. Trois d’entre elles ont déjà été installées : une au lycée Jean Jaurès dans la commune de Saint-Clément-de-Rivière, près de Montpellier, une au sein de l’agence de solidarité de Ganges et une au lycée de Sète.

Outre l’installation des boîtes, le projet comprend également leur rechargement grâce à un stock important de protections hygiéniques. L’objectif à long terme est que ces boîtes soient alimentées par toutes les personnes qui souhaitent mettre à disposition des protections hygiéniques et que celles qui en ont besoin puissent se servir librement.

Un accompagnement continu des services départementaux

Marie explique que “le Département de l’Hérault a été aidant pour la convention, réactif et très présent tout du long de la démarche, tout comme l’association, le lycée et l’agence partenaires, malgré le contexte assez difficile de la crise sanitaire.” Les services départementaux ont suivi l’accomplissement du projet jusqu’au bout. En effet, la porteuse du projet a eu un référent avec qui elle pouvait échanger en cas de questionnement et qui a su la conseiller pour mener à bien son projet.

La mise en avant du projet grâce à la plateforme du budget participatif

La porteuse de projet a pu s’appuyer sur la communication menée par le Département : “les votes viennent des personnes qui se sont intéressées à mon projet en le découvrant sur la plateforme lors de la phase des votes du budget participatif”.

Marie décrit son expérience comme enrichissante, agréable, fluide, et se réjouit d’avoir rencontré des personnes partageant ses convictions. Marie tient à “rendre moins tabou la précarité menstruelle qui peut toutes nous toucher ou toucher notre entourage”. Elle aimerait poursuivre cette lutte et continuer de faire bouger les choses : “pour beaucoup de femmes, la précarité menstruelle paraît assez loin, alors que pour certaines personnes ça devient vite un cauchemar, notamment pour les jeunes filles qui manquent l’école à cause de cela”.

Retour sur la troisième édition de la rencontre des partenaires iD City

Une communauté de plus en plus étendue

À ce jour, plus d’une cinquantaine de partenaires ont choisi la solution iD City pour mener leurs démarches de participation numérique et de démocratie participative. De natures diverses (collectivités territoriales, universités, bailleurs sociaux…), ces structures présentes dans toute la France, et depuis cette année, au Luxembourg, forment la communauté des partenaires iD City.

Cette communauté vise à favoriser les liens entre acteurs et actrices de la participation, à développer le partage d’expériences entre pairs et à contribuer à la montée en compétences sur les questions de démocratie participative. Il s’agit également de faciliter l’appropriation de la plateforme et de réfléchir collectivement à ses évolutions.

La communauté des partenaires iD City se réunit une fois par an lors d’un temps fort à Nantes et échange de manière continue sur une plateforme numérique dédiée pour partager leur expérience et s’enrichir mutuellement.

Retour sur la troisième rencontre des partenaires

C’est dans ce cadre qu’une vingtaine de nos partenaires (venus de plus ou moins loin !) se sont retrouvés à Nantes le 27 Octobre dernier pour la troisième rencontre de la communauté. Rythmée par des moments conviviaux et des temps de réflexion collective, cette journée a permis à nos partenaires de se rencontrer, de prendre connaissance des actualités d’iD City , mais aussi d’échanger sur l’avenir de notre plateforme numérique et notamment de son nouveau design, mais aussi de la participation citoyenne de manière générale.

  • Les nouveautés à venir sur la plateforme

journée des partenaires atelier 1

La deuxième partie de la matinée était dédiée à un atelier sur les évolutions à prévoir en 2023, aussi bien du côté fonctionnel que de l’ergonomie de la plateforme. Invités à s’exprimer sous le format de world café, les échanges ont abouti  à de très belles idées!

En sous-groupes, les participant·es ont tout d’abord été invités à réfléchir de façon individuelle à des modifications, améliorations, voire créations dont ils aimeraient voir la mise en œuvre. Trois groupes ont alors été formés : une première table sur les évolutions fonctionnelles, une deuxième table sur l’ergonomie du front office, et la dernière table, sur l’ergonomie du back office. Ensuite, le groupe mettait ses idées en commun, puis, à l’issue du temps imparti, chaque groupe changeait de table afin de participer aux trois ateliers. 

Chacun des groupes pouvait alors enrichir le travail du groupe précédent. Heureusement, chez iD City, les absents n’ont pas toujours tort, l’atelier sera décliné en ligne sur la plateforme de la communauté pour permettre aux absents de participer !

Ces idées d’évolutions feront l’objet d’un vote de la communauté des partenaires afin qu’elle détermine les évolutions à mettre en place prioritairement. Pour l’instant, ces idées sont classées Top secret donc suivez nos actualités via notre newsletter pour être tenu au courant des nouveautés à venir !

  • Lever les freins à la culture de la participation au sein d’une organisation

la journée des partenaires atelier 2

Sur demande de la communauté, l’après-midi, a été dédiée à des échanges sur la diffusion de la culture de la participation au sein des structures de nos partenaires.

Au cours de cet atelier, les participants ont identifié les freins et les prérequis nécessaires à la diffusion d’une culture de la participation au sein d’une organisation. L’objectif de l’atelier était de déterminer les outils pouvant être mis en place, plus ou moins rapidement, pour lever ces  freins et commencer ou poursuivre l’infusion de la culture de la participation au sein des organisations représentées.

À l’issue de cet atelier, les partenaires étaient déterminés à mettre en place de nouvelles actions en ce sens : écriture d’une charte de la participation, sensibilisation des services ou des élus, etc. Nous avons hâte d’en voir les retombées! 

Merci aux participants de cette troisième édition de la rencontre des partenaires, nous avons déjà hâte d’être l’année prochaine!

L’équipe iD City