Communication et mobilisation du budget participatif

La communication et la mobilisation du budget participatif sont le fer de lance de la participation. Le meilleur des dispositifs, s’il n’est pas accompagné d’une communication minutieuse et évolutive, est voué à l’échec. Cette communication est composée de deux axes principaux : la communication interne et la communication externe. Mais elle inclut également un volet de communication politique inhérent au dispositif.

La communication politique

Le budget participatif est un acte politique fort puisqu’il s’agit de déléguer une part du budget d’investissement aux citoyens.

De ce fait, les élus en font un argument de communication politique. Celle-ci doit donc être organisée au mieux pour trouver un juste milieu. Une mise en retrait trop
importante dévaloriserait le dispositif et une omniprésence porterait atteinte à la crédibilité du budget participatif organisé.

Objectifs :

  • Donner une légitimité politique au budget participatif
  • Trouver un équilibre entre communication institutionnelle et communication politique

Acteurs :

  • Les élus en charge du budget participatif
  • Le cabinet politique
  • Le service en charge du budget participatif

Conseil :

Isoler les moments-clés du budget participatif comme l’annonce des lauréats ou l’inauguration des projets pour une communication politique bénéfique au dispositif.

La communication interne

Les projets du budget participatif concernent la plupart des services de la collectivité.

De plus, la nouveauté de ce dispositif peut effrayer certains services ou soulever des questions. C’est notamment pour ces raisons que la communication interne doit être la plus efficace et la plus précoce possibles.

Objectifs :

  • Former et sensibiliser les services au budget participatif
  • Anticiper la future charge de travail des services
  • Fluidifier la transmission des informations entre les services

Acteurs :

  • Le service en charge du budget participatif comme pivot de cette communication
  • L’ensemble des services de la structure

Conseil :

Certaines collectivités désignent un ou plusieurs interlocuteurs par service, afin de réguler le dialogue avec le service en charge du budget participatif.

La communication externe : le rayonnement du budget participatif

C’est la face visible de l’iceberg pour le budget participatif. Elle comprend l’ensemble des opérations de communication vers les destinataires du dispositif.

Cet aspect de la communication appelle à la construction d’une stratégie de communication qui reprend les codes de la communication publicitaire et s’éloigne de la communication publique classique.

Objectifs :

  •  Faire connaître l’existence du budget participatif
  • Communiquer le règlement du dispositif
  • Provoquer la participation du plus grand nombre

Acteurs :

  • Le service en charge du budget participatif
  • Le service communication
  • Le cabinet politique
  • Éventuellement faire appel à une agence de communication

Conseil :

Les diverses expériences en matière de budget participatif témoignent de l’importance du contact direct. Il est nécessaire d’aller à la rencontre des habitants pour provoquer la participation.

La communication externe : l’accompagnement des porteurs de projets

Cette facette de la communication peut être considérée à cheval entre la communication interne et externe.

Elle consiste à gérer et dynamiser les contacts entre les porteurs de projets et les services qui les réaliseront.

Objectifs :

  • Faciliter les relations entre les porteurs de projet et les services en charge de l’étude et/ou la réalisation des projets
  • Faciliter le travail des services en charge de la réalisation

Acteurs :

  • Le service en charge du budget participatif
  • Les porteurs de projets
  • Les services en charge de la réalisation des projets

Conseil :

Communiquer également aux porteurs d’idées non recevables les motifs de refus pour garantir la transparence du dispositif

 

Sources à l’origine de l’article « Communication et mobilisation du budget participatif » :

– Observations de l’équipe d’iD City à retrouver en intégralité dans le Guide pratique du budget participatif en ligne ou au format PDF

Les phases du budget participatif

Déclinaison des 6 phases du budget participatif 

On repère traditionnellement six phases dans un budget participatif : une première de structuration, quatre de mise en œuvre (l’appel à idées, l’analyse des idées, le vote des projets et la réalisation des projets)  et une dernière d’évaluation du dispositif.

les phases du budget participatif

1/ Structurer le budget participatif

Tout d’abord, lors de la création du budget participatif, la première phase consiste à définir les modalités d’organisation du dispositif pour l’adapter à son territoire.

Il faut au préalable se poser une question centrale : pourquoi mettre en place un budget participatif dans la collectivité ?

Les objectifs identifiés vont guider la structuration du budget participatif. Une collectivité peut privilégier l’inclusion, la justice sociale ou encore d’autres critères
comme le renforcement de la démocratie locale.

Quels publics cibles ?

Il est important de se demander qui peut participer en fonction des objectifs défendus par le budget participatif.

Il existe plusieurs options méthodologiques pour définir les publics invités à participer :

  • Cibler un public spécifique en créant un budget participatif réservé aux jeunes.
  • Limiter la participation en fonction de la qualité juridique des participants entre personnes morales / personnes physiques.
  •  Ouvrir la démarche aux usagers du territoire ou seulement aux habitants.
  • Réglementer l’âge limite des participants, pour permettre à des mineurs de participer.

Quand ?

Le budget participatif est caractérisé par une dimension cyclique. C’est à dire qu’il est renouvelé à intervalles réguliers : une édition tous les ans ou tous les deux ans en fonction des structures et des stratégies.

  • Une édition annuelle, option la plus souvent choisie, permet aux citoyens de s’approprier rapidement le dispositif.
  • La qualité d’un dispositif bi-annuel est de donner plus de temps aux services pour organiser au mieux le dispositif, tout en accroissant les capacités financières
    allouées au budget. Cet intervalle permet de promouvoir le budget participatif grâce aux projets réalisés de l’édition précédente.

Quel calendrier définir ?

Pensés sur un ou deux ans, les cycles des budgets participatifs demandent à être planifiés et partagés par les différentes parties prenantes.

De plus, certaines phases sont chronophages et sollicitent différemment les personnes, agents ou élus. Le calendrier est à penser en articulation avec les autres projets
portés par la structure organisatrice. Les durées des phases de la frise sont issues d’observation de terrain et sont données à titre indicatif. Le temps à y consacrer
dépend notamment des moyens alloués au dispositif et des méthodes choisies.

Le schéma ci-dessous donne un ordre de grandeur indicatif de la durée de chacune des phases du budget participatif :

les phases du budget participatif

Les données nécessaires à l’évaluation sont récoltées lors des phases précédentes.

Quel montant ?

Le montant des budgets alloués, ainsi que les moyens mis à disposition du dispositif varient en fonction de la taille et des capacités des collectivités.

Habituellement les budgets participatifs oscillent entre 2,5 % et 5 % du budget d’investissement de la structure. En moyenne, le budget attribué aux budgets
participatifs représente 6,50 € par habitant. Des collectivités font le choix d’encadrer le coût maximal par projet. Ce qui a pour conséquence de multiplier le nombre de projets lauréats.

Exemple : Les 3 projets “exceptionnels” des Landes

Le département des Landes a choisi de plafonner le montant maximal des projets en créant deux catégories. La première comprend les projets dont le coût est inférieur à 80 000 €. La seconde intègre les projets compris entre 80 000 € et 100 000 € dont le nombre de lauréats est limité à 3.
Grâce à ce système, l’enveloppe du budget participatif du Département a pu financer des projets de moins grande envergure qui n’auraient pas été lauréats si le nombre de projets plus coûteux n’avait pas été limité.

Quelle organisation géographique ?

Le budget participatif est toujours limité au territoire de la collectivité, mais il existe quelques modalités d’organisation géographique particulières :

  • Diviser géographiquement son territoire pour s’assurer que chaque quartier ou canton dispose d’un projet lauréat. Ce qui permet d’assurer une répartition égalitaire sur le territoire.
  • Opérer une redistribution sociale en favorisant l’émergence de projets dans certains secteurs géographiques, ce qui témoigne d’une vision plus équitable du budget participatif.

Exemple : ”Au moins 30 Millions d’euros de projets” pour les quartiers populaires à Paris

Paris réserve au moins 30 millions d’euros pour les quartiers populaires par édition, depuis 2016. Les fonds sont répartis à part égale entre les budgets participatifs des arrondissements (15M€) et celui du tout Paris (15M€). Ils permettent de renforcer l’équité territoriale et la justice sociale. Cette démarche est amplifiée par un financement annuel à des associations sur le terrain, accompagnant les porteurs de projets.

Quelle gouvernance ?

Le budget participatif est une démarche qui vise à associer les citoyens à la politique budgétaire de la collectivité. La gouvernance et l’organisation sont internalisées ou partagées. Cette démarche permet d’introduire une nouvelle forme de participation à la vie publique.

Le moyen privilégié pour associer les citoyens est la création d’une commission citoyenne, composée de citoyens volontaires et parfois d’élus. Elle est généralement
garante de l’intégrité de la démarche, chargée du suivi du budget participatif (étude de la recevabilité, dépouillement…) et de ses évolutions. Cependant, le type de gouvernance employé varie d’une collectivité à une autre :

  • Gouvernance internalisée : seule la structure organisatrice a un pouvoir de décision sur le cadrage de la démarche.
  • Gouvernance partagée mixte : les citoyens ont une place dans le processus de décision et de cadrage du dispositif. Cela peut prendre la forme d’une commission mixte composée d’élus et de citoyens ou bien de deux commissions distinctes, l’une citoyenne et l’autre politique.
  • Gouvernance déléguée : les citoyens décident des modalités de mise en œuvre du dispositif. Les élus sont seuls garants de la légalité de la démarche, les citoyens ont un mandat pour l’organisation.

Ainsi, pour ce qui est de l’organisation interne, la bonne tenue du dispositif nécessite de nommer une personne référente du budget participatif au sein de la structure.
Ce référent principal doit avoir un interlocuteur privilégié dans chaque direction. L’organisation de réunions régulières permettra aux agents impliqués de s’approprier le dispositif et de favoriser la transversalité entre les services.

Exemple : La commission citoyenne mixte de la Dordogne

Composée de 119 membres pour la première édition, la commission réunit un peu plus d’une centaine d’habitants volontaires et une dizaine d’élus représentatifs de l’assemblée délibérante. Elle a pour rôle de participer à la validation des projets soumis au vote et veiller au bon déroulement de la campagne. De plus, quatre membres citoyens tirés au sort participent au dépouillement et valident les résultats du vote. Cette commission n’est pas
seulement consultative, elle possède un pouvoir d’arbitrage.

Rédiger le règlement de la démarche

Les modalités de cadrage choisies sont le socle du règlement du budget participatif. Le règlement structure le processus et guide son déroulement. Les règles doivent
être claires, accessibles et complètes, afin de garantir la transparence de cette démarche participative.

Les éléments-clés d’un règlement sont :

  • Les objectifs du dispositif ;
  • Le budget alloué ;
  • Le périmètre du dispositif ;
  • Le mode de gouvernance ;
  • Les étapes du dispositif, précisant les modalités de participation (qui, comment, où…) ;
  • Les conditions de recevabilité des idées (critère d’évaluation, budget maximum…) ;
  • Les modalités de désignation des lauréats ;
  • Les modalités de réalisation ;
  • Les modalités d’évaluation du dispositif.

Certaines collectivités font le choix de co-construire leur règlement avec les citoyens. Cette méthode favorise l’appropriation du dispositif par tous les acteurs
dès sa conception. Ceci affirme également la volonté de les associer à la gestion de l’argent public. Leur implication lors de la construction du règlement, à l’instar d’une commission citoyenne, permet d’amplifier la dimension délibérative du dispositif.

Exemple : Une co-construction décentralisée pour le Gers

Pour sa deuxième édition, le Département du Gers a organisé deux soirées ouvertes à tous les citoyens pour co-construire le règlement de son budget participatif. Ces réunions ont réuni près de 300 personnes chacune. Sous forme de table de travail, chaque groupe d’une dizaine de personnes devait réfléchir à une question du règlement. Au cours de ces soirées, les citoyens volontaires ont pu se faire connaître pour devenir membres de la commission
citoyenne du budget participatif. Cette commission a eu pour rôle d’arbitrer et valider les propositions et réflexions élaborées pendant les deux réunions.

 

Exemple : Une co-construction numérique et présentielle pour la Gironde

Le Département de la Gironde a fait le choix de discuter avec les Girondins de certains aspects du règlement. Dans un premier temps, un questionnaire en ligne a été diffusé via leurs différents moyens de communication (site internet, mails…). Cette méthode a été accompagnée d’une médiation sur le terrain par deux personnes en service civique entre novembre 2019 et janvier 2020. Dans un second temps, deux rencontres citoyennes, les 15 et 16 janvier, ont permis de finaliser le règlement du budget participatif.

2/ Organiser l’appel à idées

Deuxièmement, cette phase consiste à récolter les idées des citoyens pour leur territoire. Elle va déterminer les autres phases du budget participatif et doit être la plus inclusive possible.

Lors de cette phase, il faut veiller à :

  • Toucher une population la plus hétérogène possible ;
  • Inciter les participants à déposer des idées conformes aux critères de recevabilité inscrits dans le règlement ;
  • Anticiper la dimension contentieuse de certaines idées dès la phase d’amont.

Cette phase implique de s’intéresser à plusieurs éléments méthodologiques.

La durée

Cette durée oscille entre 1 et 2 mois. Elle doit être suffisamment étendue pour permettre une mobilisation des habitants.

La quantité d’information demandées au dépôt d’idées

Demander peu d’informations facilite le dépôt d’idée et augmente l’accès à la participation.

A contrario, plus le nombre d’informations demandées au dépôt augmente, plus les freins à la participation sont importants. En revanche, lors de la phase d’instruction, le travail des services sera facilité car ils auront une appréciation plus détaillée de l’idée.

Limiter le dépôt d’idées

Il est possible de restreindre la participation lors de cette phase en :

  •  Limitant la participation des lauréats des éditions précédentes. Cette option permet de limiter la “professionnalisation” des participants et renforcer l’équité du dispositif en ne permettant pas à des porteurs de projets d’être lauréats de deux éditions consécutives.
  • Limitant le nombre de dépôt par personne (ex : 1 idée par personne) Contraindre les participants à ne déposer qu’une idée maximum par personne permet d’assurer une opportunité égale aux participants de voir leur idée réalisée. Ceci les incite également à mûrir leur idée avant de la déposer.

Exemple : Distinguer porteurs de projet et votants à Lanester (56)

La ville de Lanester distingue les personnes qui peuvent proposer des idées (tout individu ayant un intérêt pour la commune : habitant ou usager) des votants (qui doivent être des résidents de la Ville pour participer au vote final). Ainsi les idées peuvent être déposées par un large panel de personnes mais seuls les citoyens de la commune peuvent sélectionner les projets qui seront réalisés parmi les 10 projets finalistes.

Les formats de dépôt d’idées

Autant que faire se peut, varier les formats de dépôt d’idées permet de faciliter l’accès au dispositif et d’augmenter la participation.

  • Des dépôts physiques par bulletins papier
    • Des urnes dans des lieux publics (mairie, maisons de quartiers…) qui restent sur place durant toute la durée de la phase de dépôt.
    • Des urnes mobiles pour aller vers les habitants sur tout le territoire et favoriser la participation en améliorant l’accès au budget participatif.
  • Via une plateforme numérique
    • Dématérialiser le dépôt d’idées.
    • Faciliter le dépôt : abaisser les barrières spatio-temporelles.
    • Retranscrire les idées papier sur la plateforme numérique pour centraliser les informations.
  • Il faut penser également à accompagner ces formats de participation par des dispositifs de médiation numérique pour pallier les inégalités (d’équipement, sociales, d’illectronisme…)

Exemple : La caravane du budget participatif en Dordogne
Inspirée du Gers, une caravane du budget participatif sillonne la Dordogne. Le Département va à la rencontre de ses habitants et promeut son dispositif. Utilisée pour informer la population, la caravane est un moyen efficace pour être présent et reconnu sur tout le territoire. Elle interpelle les citoyens et permet d’engager une discussion autour du budget participatif pour les impliquer. Réel outil de mobilisation, elle est un lieu d’appropriation du budget participatif pour les citoyens, porteurs de projet et agents de la collectivité.

Exemple : Favoriser le dépôt de projets collectifs à Lanester (56)
La commune de Lanester met en place des ateliers de construction de projets pour ses citoyens. Chaque quartier de la ville accueille au minimum un atelier. Durant ces réunions, les participants sont amenés à réfléchir collectivement à des projets pour les soumettre au budget participatif. L’animation est assurée par les agents en charge de la démarche. Ils ont pour rôle de présenter le budget participatif et de s’assurer que les projets discutés en groupes répondent aux règles fixées par la charte. Ces événements permettent de stimuler le dépôt de projets et d’en garantir la qualité. Enfin, la ville a observé que ces réunions permettent de constituer et consolider des collectifs autour de projets communs à l’échelle des quartiers, voire inter-quartiers.

Exemple : Les ateliers de concertation d’Aytré (17)
Lors des ateliers de concertation d’Aytré, les agents en charge du budget participatif, accompagnés de techniciens, présentent le dispositif dans les maisons de quartier. Après un temps de questions/réponses, la Ville accompagne les futurs porteurs de projets pour les aider à structurer leurs idées et notamment à estimer les coûts. Pour cela, les participants sont répartis autour de tables en essayant d’associer les personnes néophytes et les personnes ressources. Cette étape préliminaire au dépôt des projets favorise les échanges entre les citoyens et l’émergence de projets aboutis.

 

La publication des idées proposées

La population doit être en mesure de prendre connaissance des idées déposées. Au cours de cette phase, une plateforme numérique est un outil à privilégier afin de :

  • Publier instantanément (ou après modération) les idées proposées ;
  • Mettre en exergue les consensus et dissensus que peuvent provoquer certaines idées déposées en ouvrant un espace de “commentaires” qui permettra des échanges entre les citoyens.

Point de vigilance : les idées du budget participatif ne seront pas toujours reçues favorablement par la population. Ouvrir le débat dès la phase de dépôt peut conduire à modifier certains aspects problématiques des idées.

3/ Instruire les idées

Il existe deux niveaux d’instruction des idées : la recevabilité et la faisabilité. Simultanées ou non, ces deux instructions prennent entre 2 et 5 mois.

Ce sont des temps de forte mobilisation des services. Cette phase doit être la plus transparente possible sous peine d’être considérée comme une boîte noire pour les citoyens et de discréditer le dispositif. L’instruction a pour but de déterminer les projets qui seront soumis au vote.

Idées ou projets ?

Il existe deux moyens d’utiliser ces terminologies. Certaines collectivités ne font pas de distinction entre une idée et un projet. Les deux mots sont utilisés comme des synonymes. Pour d’autres, une idée est ce qui est soumis par un citoyen, tandis qu’un projet est le résultat de l’instruction et ce qui sera soumis au vote. Dans cette seconde configuration, une idée évolue en projet. C’est cette articulation entre idée et projet qui est utilisée dans le document.

Etude de la recevabilité

Ce temps consiste à déterminer si les idées correspondent au cadrage indiqué dans le règlement (compétences de la collectivité, relevant
de l’intérêt général…). La recevabilité est généralement vérifiée en amont d’une phase de présélection ou de regroupement des idées.

Il existe plusieurs méthodologies pour définir la recevabilité :

  • Étude en interne : elle est menée par le service porteur du budget participatif, mais doit aussi faire appel à d’autres services, notamment ceux qui seraient impliqués dans la future réalisation.
  • Étude partagée avec les citoyens : certaines collectivités s’appuient sur leur commission citoyenne ou mixte pour évaluer la recevabilité. Les citoyens doivent pour cela avoir les moyens, matériels et temporels, de faire l’analyse. Si différents services ou groupes sont amenés à appliquer les critères d’éligibilité,
    il est nécessaire de porter attention à une application uniforme de ces derniers.

Exemple : L’étude de la recevabilité des idées par la commission citoyenne de l’Hérault
La commission citoyenne mise en place par le Département de l’Hérault a pour rôle d’étudier les idées au regard des critères de recevabilité. Pour cela, les membres ont travaillé en ligne à l’aide de votes et commentaires sur les idées. Des séances plénières ont permis d’acter et de réviser les décisions prises en ligne. Pour aider la commission citoyenne, le Département a doté chaque membre d’un jeu de cartes reprenant un à un les critères de recevabilité. Cette méthode de travail originale permet de partager l’instruction entre agents et citoyens, tout en améliorant la transparence du dispositif.

Présélection des idées

Certaines villes choisissent de faire une présélection des idées recevables pour alléger la charge de travail des services et améliorer la qualité de l’instruction.
Cette étape intermédiaire s’organise comme un véritable vote avant le vote pour désigner les projets qui seront en lice pendant la campagne des porteurs.

Exemple : Le Forum des projets de Lanester (56)

Durant la phase de dépôt, les projets dont la recevabilité est approuvée par le service Vie citoyenne sont déposés sur la plateforme numérique, sur laquelle les habitants peuvent voter en faveur de chaque projet. Dans un second temps est organisé le forum des projets, cet événement est ouvert à tous (habitants et usagers). Les porteurs de projets viennent successivement défendre leur idée devant l’assemblée, dont chaque membre désignera 4 projets par vote préférentiel. À la fin de cette journée, les votes numériques et présentiels sont comptabilisés en direct et les 10 projets ayant réuni le plus de voix deviennent les finalistes de l’édition en cours. À noter que les votes présentiels ont une valeur supérieure aux votes numériques durant cette phase.

 

Exemple : Le forum des idées de Grenoble (38)

Présenté comme une agora citoyenne, cette journée a pour objectif de désigner 30 idées qui seront soumises à l’instruction. Un stand est offert à chaque porteur d’idée réuni par thématique dans des show rooms. Les habitants présents peuvent visiter chaque stand et échanger librement avec les porteurs.
À l’issue de leur visite, les habitants désignent 6 idées qui ont leur préférence. À la fin de l’événement, les résultats sont comptabilisés et les 30 idées recueillant le plus de suffrages passent à l’instruction.

Étude de la faisabilité

Cette phase consiste à déterminer si les projets sont légaux, faisables techniquement et estimer leur coût. Ce travail est réalisé en interne par les services de la collectivité. Généralement, les techniciens doivent pour chaque projet :

  • Comprendre le besoin. Cela implique parfois des déplacements in situ et des rencontres avec les porteurs de projets ;
  • Faire une étude de contexte (repérer les contraintes, vérifier que le projet n’est pas déjà porté par la collectivité…) ;
  • Contacter les partenaires, si besoin, afin de connaître leur position sur le projet ;
  • Chiffrer le projet.

Cette phase d’instruction peut être chronophage. L’une des clés de la réussite est l’anticipation de la charge de travail pour les services. Les méthodes de travail en interne doivent faciliter une collaboration entre les services, afin de garantir la transversalité. Les moyens humains attribués au dispositif jouent un rôle décisif dans cette phase.

Différents éléments vont déterminer la charge de travail des services :

  • Le nombre d’idées à étudier
    S’il est compliqué de quantifier en amont le nombre d’idées qui seront proposées par les citoyens, des collectivités font le choix de mettre en place un temps de
    présélection. En regroupant, fusionnant ou limitant le nombre de projets pouvant accéder à la phase de faisabilité, ce moment a l’avantage de réduire la quantité d’idées à instruire par les services.
  • La relation aux porteurs d’idées
    Durant cette phase, certaines collectivités font le choix de rencontrer les porteurs d’idées. Cette démarche peut être mise en place dans le but de comprendre au
    mieux l’idée soumise. Elle peut conduire à affiner et modifier l’idée avec son auteur en fonction des contraintes identifiées et de l’expertise des techniciens.

Exemple : Une équipe basée sur le volontariat, pilotée par le cabinet en Dordogne
Le budget participatif du Département de la Dordogne est piloté par le cabinet du Président. L’équipe du budget participatif est composée d’agents volontaires. Toutes les directions du Département sont représentées. Ce fonctionnement permet aux agents de participer à une démarche sortant du cadre de leurs missions habituelles. Selon le Département de la Dordogne, cette structuration apporte du dynamisme et valorise le travail des agents volontaires.

Exemple : Rencontrer les porteurs de projets pour mieux comprendre le besoin à Montreuil (93)
Le budget participatif de Montreuil est piloté par la direction Citoyenneté, en collaboration avec la direction des Espaces publics et de l’Environnement. La recevabilité est étudiée en amont par une étape de présélection, dite “Agoras citoyennes”. Durant la phase d’étude de la faisabilité, les porteurs de projet sont contactés pour clarifier les propositions aux services instructeurs. Cela permet de s’assurer que les idées proposées répondent aux besoins du projet soumis. Les modifications nécessaires ou l’infaisabilité sont donc partagées.

Que faire des idées non-soumises au vote ?

En cas de refus, les participants doivent comprendre pourquoi leur idée n’est pas soumise au vote.
Il faut détailler le plus possible ces motifs. Pour garantir la transparence du processus, il est recommandé de publier les motifs de non-recevabilité des idées : coût trop élevé, idée profitant à des intérêts privés, idée induisant des dépenses de fonctionnement, etc.

Que deviennent les idées ne relevant pas des compétences de la collectivité ?

Pour finir, certaines collectivités font le choix de transmettre les idées aux collectivités ou institutions concernées. Par exemple, le Département du Gers oriente les idées non transformées vers des dispositifs plus adaptés.

4/ Articuler la campagne et le vote des projets

Pour introduire cette phase du budget participatif, il faut savoir qu’elle comprend deux éléments concomitants : la campagne menée par les porteurs de projets et le vote.

La réussite de cette phase s’appuie sur l’implication des porteurs de projets. Ils doivent être moteurs de cette campagne, en plus de la communication institutionnelle, pour faire de leurs projets les lauréats de l’édition en cours. Cet investissement crée une véritable émulation citoyenne qui va contribuer à favoriser la participation. Lors de cette phase, les éléments à prendre en considération sont les suivants.

La publication des projets

Les services en charge du budget participatif vont amorcer cette phase en publiant les projets validés lors de la phase d’instruction. Cette phase est primordiale pour permettre aux participants de prendre connaissance des projets soumis au vote et des modalités de vote.

Les visuels et les noms de l’ensemble des projets doivent être disponibles partout où il sera possible de voter :

  • Sur la plateforme numérique qui permet de voter directement après avoir pris connaissance des projets.
  • À proximité des urnes de vote physique grâce à un catalogue qui recense l’ensemble des projets soumis au vote.

Les moyens de vote et l’authentification des votants

Les moyens de votes peuvent se compléter. En France, on repère communément :

  • Le vote sur internet via une plateforme numérique ;
  • Le vote physique : avec des urnes dans des lieux fixes ou des dispositifs ambulants.

Point de vigilance :

Il est primordial d’authentifier les votants afin que ces derniers ne puissent pas voter plusieurs fois. Cette identification doit être nominative pour repérer des participants qui voteraient sur internet ET de manière physique. Ceci aurait pour conséquence de biaiser le vote en ne respectant pas le principe d’unicité.

Les modes de scrutin

Comme pour tout vote, le mode de scrutin du budget participatif est un choix fondamental. Les résultats du vote pourront varier en fonction de la méthode choisie.

  • Le vote unique : d’un côté, il permet de faciliter le vote, de l’autre il n’incite pas les participants à s’intéresser à l’ensemble des projets.
  • Le vote multiple : il impose aux votants de voter pour plusieurs projets (ex : sélection de 3 projets ou sélection de 3 à 5 projets).
  • Le vote préférentiel : cette méthode implique de voter pour plusieurs projets de manière ordonnée en leur attribuant différentes valeurs calculées de façon dégressive (ex : le premier choix vaut 5 points, le deuxième vaut 4 points, etc.).
  • Le vote par répartition d’une enveloppe : cette méthode consiste à demander aux votants d’utiliser l’enveloppe globale du budget participatif jusqu’à son épuisement entre leurs projets favoris.
  • Le vote par note : il nécessite d’attribuer une note à chaque projet pour les départager.
  • Le vote pondéré : ce mode de scrutin consiste à attribuer une enveloppe de points que les votants répartissent entre les différents projets.
  • Le vote democracy 2.1. : les votants disposent de deux points positifs et d’un point négatif à attribuer.
  • Le vote par approbation : les votants s’expriment pour ou contre les projets proposés.

Les contraintes de vote

Le vote d’un budget participatif peut comprendre des contraintes qui obligent le votant à sélectionner un ou plusieurs projets d’un secteur géographique ou d’une catégorie spécifique. Ces restrictions sont généralement créées pour être en accord avec des règles indiquées dans le règlement de la démarche. Mais attention, ces contraintes complexifient le processus de vote. Il ne faut pas en abuser, sous peine de freiner la participation.

Voici des exemples non exhaustifs de contraintes existantes :

  • Contraindre le votant à sélectionner des projets issus de secteurs géographiques différents (quartiers, cantons, territoires…). Ou au contraire, le contraindre à voter pour des projets d’un même secteur ;
  • Contraindre le votant à sélectionner au moins un projet d’une catégorie spécifique (“Projet jeune” par exemple) ;
  • Contraindre le votant à sélectionner un projet de la catégorie “projet supérieur à 20 000 €”, puis un second projet de la catégorie “projet inférieur à 20 000 €”.

Et après que fait-on des projets non réalisés ?

Nous vous recommandons d’en faire une base de données. Les projets déposés constituent un diagnostic du territoire, notamment quand ces derniers reviennent régulièrement au fil des éditions. Ces projets peuvent alimenter les politiques publiques de la collectivité, hors du cadre du budget participatif, si l’exécutif souhaite s’en saisir.

Le dépouillement des votes

Le dépouillement intervient à l’issue de la phase de vote. Il permet de comptabiliser les votes des citoyens et de désigner les projets lauréats. À l’image de l’instruction, le dépouillement des votes est un temps de forte mobilisation des services.

Le dépouillement est généralement organisé en plusieurs étapes :
1. Clôturer les votes papier et numérique.
2. Rassembler les urnes réparties sur le territoire.
3. Dépouiller les bulletins de vote papier. Lors de cette étape, différentes modalités d’organisation sont possibles.

  • Dépouiller au fur et à mesure les bulletins papier. Dans ce cas, les personnes
    chargées du dépouillement récupèrent régulièrement les bulletins déposés
    dans les urnes.
  • Organiser une journée de dépouillement.

4. Additionner les résultats du vote papier à ceux du vote numérique et vérifier d’éventuels doublons de votants.
5. Désigner les lauréats en fonction des critères inscrits dans le règlement.
6. Publier les résultats des votes et annoncer les projets lauréats. Cette annonce peut faire l’objet d’une cérémonie publique. Elle permet de remercier les porteurs
de projets et les agents pour leur participation. L’étape de dépouillement peut également être participative et non pas effectuée seulement par les services. En effet, plusieurs structures ont fait le choix d’impliquer les citoyens à cette occasion. Cette pratique permet de garantir la transparence du scrutin.

Voici quelques configurations possibles :

  • Le dépouillement est effectué par les services. Les résultats sont ensuite entérinés par une instance citoyenne ad hoc ou préalablement constituée.
  • Le dépouillement est réalisé par des citoyens volontaires, des élus et les services.
  • Le dépouillement est accompli par l’instance citoyenne du budget participatif, type commission citoyenne, épaulée par des élus et des agents.

Point de vigilance : La procédure de désignation des projets lauréats doit être anticipée lors de l’écriture du règlement du budget participatif. Certains cas particuliers, comme des projets au même nombre de voix ou le devenir du projet conduisant à la saturation de l’enveloppe, sont à arbitrer dès la structuration du budget participatif.

5/ Réaliser les projets

Phase importante et attendue par les porteurs, les projets lauréats vont être réalisés. Ils pourront devenir concrets à partir du moment où l’assemblée délibérante valide les résultats du budget participatif.

Deux principales questions se posent autour de la réalisation.

  • L’implication des citoyens : la réalisation doit-elle être seulement du ressort de la collectivité ?
    Elle peut être partagée ou non, avec les porteurs de projets, en associant les instances citoyennes déjà présentes sur le territoire ou en ouvrant à toute personne souhaitant être associée. L’association des porteurs de projet au cours de la réalisation est conseillée, afin qu’ils ne se sentent pas dépossédés de leur projet. À noter que si la collectivité demande une forte implication aux porteurs de projets, ceci pourra être un frein à la participation de certains citoyens. Il est également possible d’adapter le degré d’implication à chaque porteur de projet, afin que cette phase ne dissuade pas la participation.

 

  • La méthode de réalisation des projets : les projets lauréats, financés par l’enveloppe du budget participatif, sont réalisés par la collectivité. Mais ce fonctionnement n’est pas systématique. Les conseils départementaux réalisent la plupart des projets en attribuant une subvention aux porteurs de projet ou réalisent un partenariat avec la commune sur laquelle est implanté le projet. Ce partenariat induit un partage légal du financement d’au moins 20 % pour la commune et demande une forte ingénierie de projet. La mise en œuvre des projets peut être réalisée par des agents ou bien par des prestataires, ou bien faire l’objet d’une participation élargie, via des chantiers participatifs par exemple.

Suivre la réalisation des projets

Rendre accessible au public le suivi des étapes de réalisation des projets est un élément-clé de la transparence du processus. Le numérique facilite l’accès à l’information au plus grand nombre et de manière évolutive.

Les principales informations nécessaires au suivi sont :
Le projet et son histoire : une présentation décrivant le projet, le budget attribué, l’année de la votation, le nombre de votes obtenus. Ces informations sont essentielles pour qu’une personne n’ayant pas participé puisse comprendre l’histoire : de l’idée d’origine au projet réalisé.
• Les étapes de réalisation : une manière plus ou moins détaillée, renseigner publiquement les différentes étapes d’avancement du projet permet de donner de l’information régulière sur le projet.

Exemple : La contestation d’un poulailler à Grenoble (38)
Certains projets lauréats font face à une contestation lors de leur mise en œuvre. Ce fut le cas pour un projet de poulailler à Grenoble. Une concertation a été réalisée, afin de définir les conditions de mise en oeuvre du projet, sa localisation… Cette démarche a permis de réaliser le projet en prenant en compte l’avis des différentes parties impactées.

Avez-vous pensé à ouvrir les données du budget participatif en open data ?

Point de vigilance : Le budget participatif fait l’objet de critiques récurrentes comme l’opacité des dépenses effectives et le manque de transparence dans l’attribution des marchés durant la phase de réalisation.

6/ Évaluer la démarche

Évaluer son budget participatif permet d’adapter le dispositif et d’en comprendre les usages. Déterminant pour la suite, deux questions sont essentielles pour poser le cadre de l’évaluation.

  • Quel est le but de l’évaluation ?
    L’évaluation répond à des interrogations soulevées par le dispositif. Ces questions doivent aboutir à des évolutions concrètes de la démarche. L’évaluation doit avoir un intérêt pour la collectivité et le dispositif. Cela passe notamment par la production d’un document critique mais constructif, relevant les limites du dispositif et ses atouts.
  • À qui est destinée l’évaluation ?
    L’évaluation peut avoir plusieurs vertus et concerner les différentes parties prenantes du dispositif. Elle peut être à destination de l’équipe municipale ou bien des citoyens, déjà impliqués dans le dispositif, ou pas. Déterminer le public destinataire de l’étude permettra de choisir des critères pertinents. Certains critères seront plus ou moins adaptés selon les personnes impliquées dans l’évaluation. Le choix des critères et la démarche d’évaluation sont déterminants sur la manière dont l’évaluation sera conduite. Anticipés en amont de la démarche, ces questionnements permettent de déterminer les données nécessaires à récolter et à analyser.

Pour une évaluation la plus complète possible, il est recommandé d’associer tous les acteurs. Croiser les points de vue entre élus, citoyens et services permet d’avoir une vision globale du dispositif. Cette analyse peut reposer sur des données quantitatives et qualitatives. Une fois réalisée, une publication large des résultats permet une meilleure appropriation des enjeux liés au dispositif.

Évaluer le budget participatif à Rennes (35)
La ville de Rennes réalise un questionnaire destiné aux citoyens à l’issu du budget participatif. Les répondants doivent évaluer chaque phase et peuvent proposer des améliorations. Les services de la ville sont également interrogés par questionnaire. Cette évaluation est complétée par des rencontres et temps d’évaluation avec les Présidents des Conseils de quartier. Ces données sont par la suite analysées. Les résultats sont présentés par les services et Présidents des Conseils de quartier lors du Comité de suivi. Ce dernier, composée d’élus et habitants, dégage des constats communs et propose des améliorations pour l’édition suivante.

Sources à l’origine de l’article « Les phases du budget participatif » :

– Observations de l’équipe d’iD City à retrouver en intégralité dans le Guide pratique du budget participatif en ligne ou au format PDF;

-Antoine Bézard, Fondation Jean Jaurès, « Budgets participatifs : donner du sens à la participation des citoyens » [en ligne]. (page consultée le 16/03/2020)

– Gilles Pradeau. « Les méthodes de vote » [en ligne]. (page consultée le 16/03/2020)

Les principes du budget participatif

Les principes du budget participatif : “Vous décidez, nous réalisons”

Cette phrase est emblématique du budget participatif et recouvre par ailleurs un plus large éventail de principes du budget participatif.

Voici l’ensemble de ces principes clés :

  • Un domaine d’action délimité par les compétences de la collectivité
  • Une délégation de pouvoir : attribuer un pouvoir décisionnel aux citoyens
  • La transparence : des informations accessibles à l’ensemble de la population
  • L’intérêt général relevé par l’expertise d’usage
  • Un budget alloué
  • Un dispositif souple, adaptable au territoire
  • Une priorisation des projets par le vote
  • La délibération : créer de nouvelles opportunités de dialogue entre les citoyens
  • L’inclusion : diversifier les profils des participants (catégories sociales, tranches d’âge, résidents étrangers, etc)
  • Un dispositif cyclique : le budget participatif est renouvelé tous les ans ou tous les deux ans.

les principes du budget participatif

 

Ces principes du budget participatif ont été construits à partir :
– d’observations de l’équipe d’iD City à retrouver en intégralité dans le Guide pratique du budget participatif en ligne ou au format PDF;
– de l’ouvrage de Yves Sintomer, Anja Röcke et Carsten Herzberg, “Participatory Budgeting in Europe: Democracy and Public Governance“, Abingdon, Routledge, 2016 ;
– les articles du site budgetparticipatif.info tenu par Gilles Pradeau, doctorant à l’Université de Westminster.

Protéger les enfants des violences sexuelles

Protéger les enfants des violences sexuelles

Le projet “Kits de prévention sur les agressions sexuelles pour les mineurs” a été nommé lauréat lors de la première édition du budget participatif du Conseil départemental de l’Hérault en 2019. Lydia, fondatrice de l’association Revis, a ainsi pu profiter du budget participatif de son Département pour étendre ses actions.

L’association Revis

Fondée il y a 2 ans et demi, Revis est la première association dédiée aux victimes d’inceste créée dans l’Hérault. Lydia, en a elle-même été victime. Longtemps à la recherche d’une telle structure, elle a fondé cette association pour venir en aide aux victimes d’inceste et de psychotraumatismes. L’association accompagne les victimes de plusieurs façons : conseils juridiques, suivi psychologique, groupes de paroles pour les victimes et leurs proches. L’association a pour missions d’informer, prévenir, soutenir et sensibiliser aux psychotraumatismes. Revis dirige les victimes vers les personnes ressources à qui s’adresser pour les aider à s’en sortir.

Lydia déplore le manque d’accessibilité à l’information pour les professionnels, les victimes ou même leurs proches. C’est pourquoi elle mène de multiples projets avec l’association : la création d’annuaires de réseaux, de symptômes, de thérapies, et même la création d’une application pour les victimes. Elle souhaite également développer la prévention dans les milieux scolaires. Pas seulement sur les violences sexuelles mais aussi sur l’inceste, sujet tabou puisqu’il s’agit de violences intrafamiliales.

 

Des kits de prévention financés par le budget participatif

Le budget participatif de l’Hérault a permis de financer 3 kits de prévention :

  • Un kit pour les enfants de 3 à 6 ans contenant :
    • Un livret Les ateliers de Rosie, qui aborde les notions d’intimité, le rapport à son corps, ce qu’on peut montrer et ce que les autres ont le droit de faire ou de ne pas faire.
    • Un livret Les ateliers de Rosie, décliné, est en cours de préparation et portera sur les émotions.

L’objectif est de créer une série de livrets qui traitera de cette thématique via le personnage principal, Rosie un flamand rose, qui parle et explique à des enfants les notions de base autour du corps.

 

  • Un kit pour les enfants de 6 à 9 ans composé du jeu de cartes Le jeu des secrets, où le but est de différencier les bons et les mauvais secrets
  • Un kit à destination des adolescent·e·s : 3 saynètes de théâtre en collaboration avec le Cours Florent, où les comédien·nes présentent une scène et demandent au public d’intervenir afin de rendre les dialogues plus adaptés. L’objectif est d’encourager les adolescent·e·s à réfléchir autour du sujet de l’inceste et de savoir comment réagir si un·e proche leur dévoile ce qu’il·elle subit.

Un guide d’accompagnement est également en cours de préparation pour les animateur·rices. Il contient les références nécessaires, ainsi qu’une brochure avec un QR code à l’intention du public adolescent.

Pour l’instant, seuls les 2 premiers kits ont été réalisés et sont en vente, à prix coûtant, sur le site Helloasso, livrables en France et en Europe. Le 3ème kit, quant à lui, sera prêt d’ici le mois de juin. Les acheteur·ses de ces kits sont principalement des éducateur·rices, des psychologues, des professeurs ainsi que des parents.

Un tremplin pour les projets de l’association

Lydia décrit le budget participatif comme une belle expérience pleine de rencontres, qui a surtout pu l’aider à concrétiser un des projets de l’association. Plus précisément, le Conseil Départemental de l’Hérault a permis de financer une partie du projet, en rémunérant les illustrateur·rices et les impressions des kits de prévention.

Au vu des nombreuses demandes, et s’agissant du domaine de la santé publique, Lydia espère désormais pouvoir trouver du soutien auprès des infrastructures locales, voire nationales, pour faire grandir son association et promouvoir ses actions.

Rejoindre Revis

L’association, qui compte 2 membres bénévoles fixes, manque de moyens humains et financiers pour réaliser tous ses projets. En effet, il est compliqué pour l’association de fonctionner sur du bénévolat ponctuel, et la thématique, très sensible, est probablement un frein pour trouver de nouveaux adhérent·es.

Lydia, qui travaille à plein temps dans l’association est à la recherche de financements pour embaucher du personnel, dont des professionnels, étant donné que le sujet requiert des compétences spécifiques. Si ce projet associatif vous tente, n’hésitez pas à contacter Lydia via son site internet !

Les origines du budget participatif

Lorsque l’on retrace l’historique des premières initiatives de budgets participatifs ou même de démocratie locale, l’exemple de Porto Alegre est souvent le premier à être cité. Pour mieux comprendre les raisons de la mise en place du premier budget participatif au monde et donc les origines du budget participatif, il est nécessaire de bien resituer le contexte historique et politique du Brésil dans les années 1980.

En 1985, la dictature militaire prend fin au Brésil après 21 années pendant lesquelles corruption et clientélisme sont devenus monnaie courante. Le pays se reconstruit progressivement en rédigeant notamment une nouvelle constitution dans laquelle est inscrit pour la première fois, le concept d’exercice direct de la souveraineté du peuple.
Olivio Dultra, du Parti des travailleurs, est élu en 1988 à la municipalité de Porto Alegre, capital de la province du Rio Grande do Sul et ville de plus d’un million trois cent mille habitants. Il est animé par une forte volonté d’amélioration de la vie quotidienne des plus pauvres et de rendre un pouvoir décisionnel aux citoyens. La première expérience de budget participatif apparaît en 1989.

Un succès progressif

La ville a été divisée en secteurs régionaux et thématiques pour permettre une participation populaire, universelle et direct. L’organisation du budget participatif est composée de plusieurs strates.
Le premier niveau de réflexion est animé par des associations thématiques ou bien, le plus souvent, par des associations d’habitants. Ces associations sont composées, en grande partie, d’habitants issus de catégories sociales moyennes et pauvres. Au cours des réunions, les problèmes spécifiques du quartier sont évoqués et les priorités sont définies.

Le deuxième stade est celui des assemblées plénières, pendant lesquelles toute personne intéressée peut participer. Lors de ces assemblées, des délégués du budget participatif sont élus. Ces derniers éliront à leur tour des conseillers du budget participatif qui prendront part au Conseil du budget participatif.
L’organisation et la mise en place du budget participatif ont été amené à évoluer au fil des années. Sont par exemple apparus en 1994, des assemblées thématiques au nombre de six. Elles avaient pour but d’aborder des thèmes qui n’étaient pas spontanément présentés par les associations de quartier et qui n’impliquent donc pas certaines parties de la population (les jeunes, les professionnels de la santé, les acteurs économiques etc.)

Bien que le succès soit timide les premières années ( 780 participants la première année), l’amélioration progressive du système mis en place et la persévérance de la municipalité ont permis d’atteindre la participation de plus de 18 500 personnes en 2001.

De multiples impacts

L’initiative a eu un impact positif sur toutes les parties prenantes de la ville à différents niveaux. Pour les élus, un nouveau lien à été créé avec les citoyens. Le budget participatif a permis de mieux appréhender les besoins et les souhaits de la population. Pour les techniciens, le recueil d’information est optimisé. Pour les citoyens, c’est le moyen de découvrir le fonctionnement de la collectivité, ainsi que les contraintes qui lui sont propres. Le budget participatif incite à la mobilisation et à la responsabilisation des citoyens. Il permet une plus grande transparence dans la gestion des budgets municipaux et un contrôle dans l’application des décisions. De plus, ce sont majoritairement les personnes les plus défavorisées qui se sont mobilisées. Elles ont donc été les premières à bénéficier des mesures adoptées. Le budget participatif s’avère donc être un dispositif inclusif des populations exclues de la politique traditionnelle.

La dimension politique est indéniable dans la mise en place du budget participatif. Bien sûr, le contexte historique y est pour beaucoup. De ce fait, le projet ayant débuté en 1989 après l’élection du candidat du Parti des Travailleurs en 1988, il a été reconduit d’année en année avec toujours plus de succès et de participation.
Ceci étant, le Parti des Travailleurs subit un échec électoral en 2004. L’usure du pouvoir, une certaine insatisfaction de la classe moyenne et la promesse de maintien du budget participatif par l’opposition expliquent, en partie, cette défaite. Le budget participatif fut maintenu, mais intégré à un nouveau processus : la gouvernance solidaire locale. Mais cette nouveauté ne se montre pas aussi efficace. La distance entre les citoyens et leur pouvoir décisionnel se creuse.

Quel est l’héritage de Porto Alegre aujourd’hui ?

Bien que le budget participatif de Porto Alegre ait progressivement perdu de son influence, de nombreuses municipalités brésiliennes se sont inspirées de cette initiative. De nouveaux budgets participatifs ont commencé à émerger. Les Forums Sociaux Mondiaux (2001, 2003, 2004) à Porto Alegre ont d’ailleurs contribué à la diffusion du modèle à travers le monde. En France, les premiers budgets participatifs apparaissent dès le début des années 2000. Comme à Porto Alegre, les premières initiatives françaises sont basées sur un registre idéologique, dont la perspective est la justice sociale.
Au fil des années, les budgets participatifs se sont inscrits dans une nouvelle logique. De nos jours, les initiatives existantes en France visent à booster la participation citoyenne. Sa dimension de justice sociale est moins présente mais certaines communes favorisent spécifiquement les quartiers les moins favorisés, à l’image de Porto Alegre.
Bien que pionnière, l’initiative brésilienne n’est pas tout à fait réplicable pour les communes qui désirent s’engager dans ce type de démarche de participation citoyenne. En revanche, elle marquera pour toujours les prémices et origines du budget participatif.

Néanmoins, les expériences françaises de budgets participatifs se multiplient et rencontrent du succès. En guise d’exemple chiffré, l’édition 2017 du budget participatif de Lanester c’est : 14% des habitants inscrits sur la plateforme, 93 projets déposés, 6 000 avis citoyens et 1540 participants à la phase de vote. Un succès qui sera accompagné d’autres !

 

*Guide pratique du budget participatif à retrouver en intégralité en ligne ou au format PDF